« Il faut 20 ans pour construire une réputation et cinq minutes pour la détruire » disait l’homme d’affaires Warren Buffet. Le haut dirigeant américain Adam Mark Smith a récemment fait passer le délai de cinq minutes à environ deux minutes, la durée de sa vidéo virale postée sur YouTube. Ce directeur financier a perdu un emploi payé 200 000 dollars par an et un million de dollars de stock-options. En cause, une vidéo de protestation contre les propos homophobes du patron de la chaine de restauration rapide Chick-Fil-A.
A l’heure des médias sociaux, une vidéo ou tout autre contenu qui devient virale peut devenir très problématique. Attention aux contenus postés. Car Internet oublie rarement.
Habitant de l’Arizona, Adam Mark Smith en a fait l’amère expérience. Ce directeur financier travaillait pour un fabricant d’appareils médicaux, il a perdu un emploi richement gratifié. La raison ? Durant l’été 2012, il s’est filmé en train de réprimander une employée de Chick-Fil-A à cause des propos homophobes de son patron, Dan Cathy. Celui-ci est à l’origine de vives polémiques aux Etats-Unis entre pro et anti mariage gay.
Sur la vidéo, Adam Mark Smith vient chercher à la caisse un verre d’eau gratuit. « Je ne veux pas mettre mon argent dans cette société détestable », vitupère-t-il contre la réceptionniste qui tente de conserver son sang-froid. « Je ne sais pas comment vous pouvez travailler dans cette entreprise », continue-t-il également, avant de partir.
La publication de la vidéo sur YouTube et sa viralité vont avoir des conséquences désastreuses. Adam Smith est licencié quelques temps après de son travail, après avoir eu sa messagerie vocale déborder de menaces. Même retirée, la vidéo est reprise par d’autres personnes. Les contenus agressifs ou parodiques se multiplient sur la toile.
Deux mois après, Adam Mark Smith trouve un nouvel emploi. Mais il est licencié quelques semaines après, suite à la découverte de la vidéo par les employeurs qui lui reprochent de ne pas leur en avoir parlé lors de l’entretien de recrutement.
Les excuses faites à l’employée de Chick-Fil-A qui avait été prise à partie n’y font rien. Pas plus que le pardon public de l’employée de Chick-Fil-A, choquée d’avoir été filmée à ses dépens. Adam Mark Smith est au chômage, sa famille et lui sont désormais contraints de vivre avec des tickets de rationnement.
Afin de parler de son expérience, Adam Mark Smith a sorti un livre, « Million Dollar Cup of Water ». Il a déclaré avoir vendu sur Amazon seulement 17 copies numériques, et avoir dans le même temps reçu 23 fois la note la plus basse possible pour son livre !
Copie d’écran des notations du livre d’Adam Smith sur Amazon (source : amazon.com)
Comment ne pas ruiner sa réputation sur Internet : faire attention aux opinions émises sur la toile
Cette histoire digne d’Hollywood pose la question des traces laissées sur Internet. Elles peuvent avoir des effets dévastateurs sur la vie privée et professionnelle. Surtout si elles sont reprises et viralisées.
Comment ne pas ruiner sa réputation sur Internet ?
Le premier conseil est de faire attention aux opinions émises sur la toile. La porosité entre vie privée et vie publique s’est accentuée avec les réseaux sociaux et les blogs. Certaines déclarations ou opinions personnelles postées sur la toile peuvent avoir des conséquences désastreuses.
On se souvient du Tweet de Justine Sacco, responsable des relations publiques du groupe média américain IAC, avant de partir en Afrique du Sud : « Je pars pour l’Afrique. J’espère que je ne vais pas attraper le sida. Je plaisante, je suis blanche ! »
Conséquences, un tweet viralisé à vitesse grand V, des réactions très remontées, et malgré la lettre d’excuse de Justine Sacco à son employeur, un licenciement. Depuis, à la différence d’Adam Mark Smith, Justine Sacco a retrouvé du travail, un job d’humanitaire dans une ONG en Afrique qui travaille à faire reculer la mortalité maternelle.
Comment ne pas ruiner sa réputation sur Internet : mieux vaut prévenir que guérir en modérant
Cette maîtrise des traces est particulièrement importante dans la perspective d’une embauche. Selon une étude de 2014 de la plateforme Jobvite sur les méthodes de recrutement, 55 % des recruteurs sont influencés par les réseaux sociaux. Les candidats doivent donc plus que jamais veiller à leur e-réputation.
D’autant que les recruteurs googlelisent fréquemment les candidats. Dans le cas d’Adam Mark Smith, les résultats de la première de Google sont très pénalisants.
Résultats pour la requête « Adam Mark Smith » sur Google
Afin de ne pas regretter la publication de certains contenus, il s’agit par exemple d’enlever le tag de la publication, de la photographie ou de la vidéo afin de ne pas apparaitre dessus. Cette action ne signifie toutefois pas la suppression de la publication. Sur Facebook, vous pouvez aller sur les options de modération en cliquant sur le cadenas en haut à droite de votre compte.
Réglage des confidentialités sur Facebook
Comment ne pas ruiner sa réputation sur Internet : utiliser des sites pour aider à effacer ses traces sur les réseaux sociaux
Une fois le mal fait, des sites existent pour aider à effacer vos traces. A côté d’Account Killer pour les anglophones, Just Delete Me répartit plus de 250 sites selon leur niveau de difficulté pour supprimer un compte. Même si vos contenus peuvent être repris et devenir rapidement incontrôlables.
YouTube, Wikipedia, Pinterest ou encore Blogger constituent la liste noire d’Internet, car il est quasiment impossible de faire totalement disparaitre ces comptes. Les données personnelles représentent en effet une véritable manne pour les concepteurs des sites web. Ainsi, vous ne pouvez par exemple pas supprimer votre compte Youtube sans supprimer votre compte Google. Mais vous pouvez supprimer votre chaîne. Vous pouvez en revanche facilement supprimer Twitter en vous rendant dans ses options.
capture d’écran du site Delete Me
Comment ne pas ruiner sa réputation sur Internet : exercer son droit à l’oubli
Autre solution, à laquelle n’a pas le droit Adam Mark Smith, citoyen américain : depuis le 13 mai 2014, un résident de l’Union Européenne, de Suisse, du Liechtenstein, d’Islande ou de Norvège a le droit d’exercer son droit à l’oubli sous certaines conditions.
Les chiffres de demande de droit à l’oubli concernent majoritairement les réseaux sociaux et les blogs. Ceci s’explique en grande partie par un mauvais réglage des options de confidentialité.
Selon les statistiques récoltées par Forget.me et Semji après un an d’exercice de droit à l’oubli, 1/5 des demandes concernent les réseaux sociaux et les plateformes communautaires. Mais attention, si le nombre de demandes est élevé, le taux d’échec l’est également : d’après cette même source, seuls 7 % des URL désindexées par Google proviennent des réseaux sociaux, et le fait d’être à l’origine du contenu est le deuxième type de refus. Semji grâce à son service Google My Business permet la gestion et suppressions des avis sur votre page Google My Business.
Devant l’ampleur des refus devant les différents types de demandes (70 %) de Google face aux différents types de demande, Bertrand Girin, président de Semji, demande de faciliter les recours pour les personnes déboutées par les moteurs. « Un sujet qui semble intéressant à travailler par le législateur, dans le cadre du projet de règlement Européen sur la protection des données à caractère personnel. »